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Contre l’antilibéralisme de droite : réponses à quelques idées reçues Partie 2 l'économie libérale

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur qui est extérieur à notre mouvement. Elles ne reflètent pas nécessairement celles de notre mouvement.


Après une première partie dédiée au libéralisme dans l'histoire, et à la doctrine libérale, découvrez la deuxième partie de ce grand article du mois d'août qui va s'intéresser à l'économie libérale au travers de sept idées reçues. La troisième et dernière partie sera sur les institutions politiques et le libéralisme face aux valeurs de droite.


III – Economie libérale : l’école autrichienne (entre autres)

Idée reçue n°7 : le libéralisme ne voit que la richesse matérielle


Si le libéralisme fonde tout le Droit sur la propriété, il est faux d’en conclure qu’il ne voit que la richesse matérielle. Pas plus qu’il n’est relativiste, le libéralisme n’est pas matérialiste.

Nous nous référons en matière d’économie à la principale école libérale du XXème siècle, qui est l’Ecole autrichienne d’économie. Cette école, fondée par Carl Menger, s’est notamment illustrée avec Ludwig von Mises, ainsi que deux de ses élèves, Friedrich Hayek et Murray Rothbard.

Ludwig von Mises a beaucoup apporté à la science économique en popularisant et en généralisant les axiomes et les méthodes de la praxéologie : c’est-à-dire la science de l’action humaine[1] (praxis). La praxéologie étudie l’action humaine en tant que telle, en tant que l’ensemble des moyens mis en œuvre par les individus pour atteindre leurs buts ; sans tenir compte des circonstances de ces choix – sans, donc, tomber dans le relativisme ! Une action est une action, quelle que soient les circonstances et les motivations.

L’une des clés de l’Ecole autrichienne est la subjectivité de la valeur. Notion capitale, qui évite de nombreux malentendus.

La valeur économique n’est pas matérielle. Elle est uniquement issue de l’échange, et est subjective. Si on échange 1€ contre un pain, c’est que l’acheteur y gagne, estimant la valeur du pain supérieure à celle d’un euro. Et inversement pour le boulanger – notamment à cause des coûts de production, bien inférieurs pour un professionnel. Si un échange n’était pas jugé comme une amélioration de l’utilité de chaque acteur, il n’aurait tout simplement pas lieu. C’est ici qu’on rejoint la praxéologie : on estime les intérêts des acteurs en voyant les échanges qu’ils acceptent, qui sont ipso facto des augmentations de leur satisfaction.

Le libéral autrichien, loin de « ne voir que la valeur matérielle », ne conçoit la valeur que comme immatérielle et subjective. Le matérialisme dialectique, ce n’est pas le libéralisme, c’est le marxisme… lequel se repose sur l’idée étrange de valeur-travail[2].

Idée reçue n°8 : le libéralisme, c’est quand l’Etat donne aux riches


« L’Etat est libéral, il fait des cadeaux aux riches ! ... »

Soyons clairs : le libéralisme exclut toute forme de « cadeau » venant de l’Etat. L’Etat ne peut pas faire de cadeau en distribuant ce qui ne lui appartient pas, celui qui accepte cela n’est pas libéral. Le libéralisme rend particulièrement absurde la notion de « cadeau fiscal » : s’abstenir de prendre, ou prendre un peu moins, n’a rien d’un cadeau !

D’une manière plus générale, c’est une manipulation que de dire que le libéralisme ne profite qu’aux plus riches. Le Droit profite à tous[3]. Oui, dira-t-on, mais la défense de la propriété profite surtout aux propriétaires ! Mais dans le paradigme libéral, tout individu est propriétaire, ne serait-ce que de son propre corps.

En sens inverse, le mépris pour le droit de propriété va bien plus handicaper ceux qui ont moins, car ils n’ont pas les moyens de se protéger. De la même manière, une crise économique fera toujours plus mal aux plus pauvres qu’aux plus riches, qui auront de quoi survivre.

La libre concurrence elle-même ne profite guère aux plus riches. En effet, celui qui domine un marché n’a guère intérêt à voir émerger des concurrents. C’est ce qu’a démontré Ludwig von Mises : la concurrence profite aux moins aisés, qui auront l’occasion de bâtir une fortune – ou au moins une situation ; tandis que les gens déjà riches n’y ont plus d’intérêt. Ils vont parfois préférer perdre une partie de leur richesse au profit de l’Etat, en échange d’une stagnation sociale empêchant la concurrence. D’où le soutien de grosses fortunes aux politiques fiscalistes ; d’où le phénomène du capitalisme de connivence.

Le capitalisme de connivence désigne les entreprises privées, mais fortement liées à l’Etat, voire lui devant leur situation dominante. Cette forme perverse de capitalisme n’est évidemment pas libérale, puisqu’elle contrevient au principe de stricte impartialité des autorités. Fondamentalement, tout système non libéral correspond à un capitalisme de connivence à plus ou moins haut degré, y compris dans les régimes communistes.

Idée reçue n°9 : la théorie libérale repose sur des abstractions utopiques


Les adversaires du libéralisme lui opposent souvent, parfois en toute bonne foi, le caractère irréaliste d’une théorie du marché reposant sur des abstractions : homo œconomicus, concurrence pure et parfaite, etc.

Or, ces modèles n’ont pas grand-chose à voir avec les théories économiques libérales contemporaines. Elles sont liées à Léon Walras, puis, au XXème siècle, aux tenants du monétarisme et de l’économie mathématique[4]. Sans entrer dans les détails, les principes libéraux excluent toute mise en place d’un « modèle idéal » de l’économie, qui constituerait un constructivisme et la tentation de bouleverser l’ordre spontané de l’économie pour se conformer au modèle.

Dans le même ordre d’idée, la notion de valeur-travail a été évoquée par Adam Smith et par David Ricardo, ce qui n’en fait pas une théorie libérale – d’autant qu’avant Marx, nul n’avait commis l’erreur de dogmatiser ce concept.

Citons également l’idée de Main invisible. Idée souvent moquée, car on lui prête un contenu providentialiste qu’elle n’a pas. L’expression est d’Adam Smith[5]. C’est l’une des premières théorisations rudimentaires de la notion d’ordre spontané. Il s’agit du phénomène par lequel les conséquences involontaires des actions égoïstes individuelles convergent vers un ordre économique. C’est, tout bêtement, la base de tous les phénomènes sociaux observables. Jamais Smith n’a prétendu, tel le Pangloss de Voltaire, en faire la Providence conduisant au meilleur des mondes possibles.

Idée reçue n°10 : les libéraux veulent la croissance infinie dans un monde fini


La critique de la vision libérale de la croissance rejoint souvent la critique de la mondialisation. On y proteste contre la promotion d’une croissance économique infinie, forcément impossible dans un monde aux ressources finies…

Deux choses.

D’abord, nous l’avons dit, le libéralisme ne « promeut » rien au niveau macro-économique. Il rejette toute idée de peser sur l’économie (notamment par voie fiscale ou réglementaire) pour la faire aller dans un sens prédéfini.

Ensuite, et c’est le plus important : la croissance n’est pas la production matérielle. Nous avons parlé plus haut de la subjectivité de la valeur. La croissance est l’augmentation de la création de valeur ; or, la valeur existe via l’échange. En l’absence de toute « valeur-travail », la création de valeur n’est pas liée à la production matérielle d’un bien[6]. La valeur économique est liée à la satisfaction des consommateurs, exprimée via la conclusion des échanges qu’ils trouvent avantageux.

Si une quantité fixe de biens est échangée sans cesse, passant à travers toute l’économie, il y a croissance économique, sans aucune production matérielle supplémentaire ! Bien sûr, en pratique, les biens nécessitent d’être remplacés et améliorés. Mais l’essentiel de la croissance n’est pas là. La décroissance ne correspond qu’à une baisse de la satisfaction des consommateurs.

Idée reçue n°11 : la théorie du ruissellement


Accordons une place spéciale à cette véritable supercherie. Des antilibéraux prétendent démontrer la fausseté des théories libérales en affirmant que l’enrichissement des riches ne profite pas aux plus pauvres. Or, les libéraux affirment que, si, mécaniquement, l’enrichissement des plus riches rejaillissaient sur les plus pauvres ! Ils appellent ça le ruissellement ! Non ?

Non. Nous sommes bien au-delà de la caricature ou de la déformation : il y a un mensonge caractérisé, puisque la théorie du ruissellement n’a jamais existé. Elle n’a ni auteur, ni théorisation originelle dans une publication économique, ni démonstration prétendue… ni réfutation, par conséquent.

Aucune théorie (libérale ou autre) n’a jamais prétendu démontrer que l’enrichissement de l’élite profitait, systématiquement et en tant que telle, aux plus pauvres.

En revanche, il existe bien une conviction chez les économistes libéraux : l’argent des riches ne disparaît pas du monde des vivants. Il est nécessairement consommé, investi ou épargné. Ce qui est consommé circule dans l’économie ; ce qui est investi[7] finance la croissance des entreprises ; et ce qui est épargné profite à d’autres. L’épargne dans une banque d’affaires augmente la capacité de crédit (donc d’investissement) de celle-ci. Et même une hypothétique thésaurisation est profitable aux autres, augmentant la valeur de leur propre patrimoine en rendant la monnaie utilisée plus rare !

Evidemment, ces effets sont en partie faussés par les manipulations économiques dues à l’Etat, notamment la monnaie officielle à cours légal.

Idée reçue n°12 : privatisations contre services publics


Les opposants aux privatisations des services dits publics affirment vouloir conserver leur qualité et leurs prix bas face à « la logique du marché ». Or, il n’y a aucune raison de penser qu’une privatisation conduit à un affaiblissement de la qualité… ni même à une augmentation du prix réel.

En effet, dans la comparaison entre un service privé et étatique, ce dernier est avantagé par les caractéristiques du monopole et/ou du financement fiscal : il continue à être financé quelle que soit la satisfaction des clients. Ceux-ci paient, de toutes façons, en payant leurs impôts ; dès lors toute prétention de « gratuité » est un mensonge. La seule gratuité, c’est le bénévolat ! Le client, payant de toutes façons le service, a souvent intérêt à le consommer, plutôt que de payer une deuxième fois en s’adressant au privé.

Le monopoleur, sûr de ses rentrées pécuniaires, n’a aucun intérêt à être efficace, c’est-à-dire à maximiser sa qualité et à minimiser ses coûts. Pourquoi se fatiguer, alors qu’il est payé identiquement quelle que soit la satisfaction des usagers ?

On nous explique que le service public n’a « pas vocation à être rentable » : cela veut tout simplement dire qu’il n’a pas vocation à satisfaire ses clients, qui seront obligés de payer quoi qu’ils en pensent. Le privé est bien obligé de satisfaire sa clientèle pour ne pas la perdre.

Qu’est-ce que privatiser[8] ? C’est tout simplement rendre à la société civile ce qui, auparavant, fonctionnait en marge des règles de l’économie, donc au mépris des consommateurs.

Idée reçue n°13 : le libéralisme détruit l’environnement


On reproche également au libéralisme économique de menacer l’environnement, dont la protection nécessiterait forcément une intervention étatique. (C’est fou le nombre de problèmes censés être réglés par les hommes de l’Etat ! A croire qu’ils sont supérieurs aux simples mortels…) Dans cette critique, le libéralisme est fréquemment assimilé à la mondialisation.

Un rapide coup d’œil aux « accomplissements » de l’U.R.S.S. ou de la Chine populaire montre les limites des bienfaits du dirigisme sur l’environnement. Toujours le même problème de la centralisation : une seule mauvaise idée provoque des dégâts considérables.

Un exemple très médiatisé ces dernières années : l’Amazonie. Victime du capitalisme libéral à outrance… vraiment ? Là encore, on est confronté à l’irresponsabilité chronique d’un système étatisé. Irresponsabilité au sens fort : la majorité de la forêt amazonienne, terre d’Etat, n’appartient à personne, donc personne n’en prend soin. Un propriétaire a intérêt à cultiver son terrain et à le rentabiliser ; un prédateur n’a pour intérêt que de piller.

La solution pour la protection des écosystèmes en périls passe-t-elle par la privatisation ? Il se trouve tant de gens pour voter pour des restrictions théoriquement écologiques ; on en trouvera bien quelques-uns pour administrer un Parc naturel, par entreprise ou par association bénévole !



Etienne Mathieu

Sympathisant de Renaissance Libérale-Conservatrice


[1] Titre de son ouvrage-maître : Ludwig VON MISES, L’Action humaine (1949). [2] La théorie de la valeur-travail ne nie pas la valeur d’échange (forcément subjective), mais elle prétend y ajouter une « valeur objective », issue de la quantité de travail nécessaire à la production d’un bien. Cet article n’étant pas consacré à la réfutation du marxisme, disons que ce qui est affirmé sans preuve peut être nié sans preuve : l’existence même d’une « valeur objective » d’un bien est indémontrée – et indémontrable. [3] Le Droit profite même aux criminels, car in fine, la prédation entraîne de tels surcoûts qu’elle est moins rentable et moins stable que le commerce honnête : voir la Loi de Bitur-Camembert. [4] L’Ecole autrichienne considère comme erronée la tentative de mathématisation systématique et de « mise en équations » de l’économie, rappelant que la donnée fondamentale de celle-ci est l’action humaine, qui n’est jamais intégralement prévisible. [5] Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776 [6] Rappelons d’ailleurs que la majorité de la création de valeur dans nos économies occidentales dépend aujourd’hui des services. [7] C’est-à-dire l’essentiel. Rappelons (aux plus jeunes) que la majorité du patrimoine des plus riches n’est pas constitué d’une piscine à pièces d’or comme celle de Piscou, mais d’actions, c’est-à-dire de titres de propriété d’une partie d’une société, en échange d’un investissement financier – qu’on espère rentable. [8] Si la privatisation est réelle, bien sûr. Ne parlons pas des « concessions », encore moins de la répartition des entreprises entre les mains des apparatchiks de l’Etat, comme après la chute de l’Union soviétique.

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